Pluton faisait face à sa propre mort, ironique pour un dieu de la mort. Son bourreau ne serait pas un semblable, mais un simple mortel, un simple moojuu. Luttant jusqu’au bout, le policier sentit ses dernières forces se quitter. Une vulgaire boule d’énergie semblait bien inaccessible pour lui. Est-ce que comme ça qu’il allait mourir, au milieu d’une prison. S’il pouvait au moins entrainer le chien dans sa chute ce serait déjà ça de pris.
Tout le monde cherche une justification dans la mort. Oui, mourir en vain une crainte propre à tout être humain et pas juste aux mortels. S’il pouvait contenir Sid afin qu’il ne puisse pas s’échapper, sa mort aura eu un sens, il pourrait alors partir tranquille. Il ne pouvait pas se permettre ça, surtout pas. Il ne devait pas terminer sur un échec, il devait réussir. Il pourrait alors repartir sur une nouvelle base, et retrouver Scalio par exemple. Oui, ça semblait une bonne idée. Comment réagirait Scalio à la vue de Pluton, arborant un nouveau corps ? Nul doute qu’il serait bien surpris en voyant à quel point il avait changé ! Au final, mourir ne serait-il pas une si mauvaise chose… ce serait juste un nouveau départ ? Mais pour cela, il suffisait juste d’une seule chose, une seule et petite chose. Coincer Sid le temps que Kel arrive jusqu’à eux. Pluton pourra alors sereinement passer sur une nouvelle apparence.
Sid était victorieux de ce combat, mais restait dans un sale état et s’approcha avec difficulté vers le corps agonisant du dieu de la mort. Le moment était venu de réagir, nul besoin de lancer une attaque. Oui il pourrait très bien le faire tomber. Vu son état il faudrait du temps pour qu’il se relever et ce temps pourrait être suffisant. Son véritable adversaire n’était pas Sid, mais bien le temps. Le criminel se plaça juste au-dessus du corps de Pluton, non loin de son bras gauche. Parfait il était dans sa portée, il suffisait juste d’un coup, un tout petit coup. Mais alors… pourquoi n’arrivait-il pas ? Son corps refusait tout simplement de répondre. Si l’esprit n’avait pas abdiqué son corps, lui s’était déjà fait à l’évidence.
Le dieu de la mort se rendit ensuite compte d’une simple chose, un petit détail qu’il avait oublié : il n’avait plus de bras gauche. La douleur qui rongeait son corps et particulièrement son bras lui avait fait oublier ce détail. La partie était déjà terminée, le sort lui fit donc comprendre amèrement. Allait-il mourir en vain ici ? Il ne pouvait pas. Mais quelle idée de vouloir accepter la mort, non, NON. Le dieu de la mort avait vu en la capture de Sid de la sérénité dans sa mort. Mais en voyant son échec, toutes ses certitudes s’étaient envolées, ne lui laissant que la douleur et la peur.
« Laisse…. moi… vi… »
Le sabre repassa une nouvelle fois au travers du corps du dieu de la mort. Étrangement, il ne ressentit rien, sa douleur était en train de partir… comme si Sid venait de le guérir. Mais, alors qu’il commençait à se sentir mieux, pourquoi avait-il le sentiment que les choses s’empiraient ? Le corps inerte de Pluton fixa du regard Sid qui était en train de se préparer à son départ. Cette simple vue lui commença à le paniquer. Son corps souffrait toujours, mais plus de la même façon. Ressentant une longue chute sans fin, il sentit une immense douleur émettre de sa poitrine. Ses yeux s’humidifièrent et ses poils se dressèrent. Pluton était perdu dans une profonde angoisse.
Sa vue se flouta ne laissant apparaitre qu’une abstraite vue d’un décor tortueux dans lequel Sid le dévisageait. La tête de ce dernier s’agrandissait tout en se déformant. Le chien ouvrit la bouche montrant alors son plus beau sourire dans lequel se noyait à présent le policier. Pluton n’en pouvait plus, il ne voulait qu’une chose, partir au plus loin d’ici. Cependant il n’était plus aux commandes de son corps, il n’était rien de plus qu’une âme à la dérive.
L’obscurité montait d’un cran, le sourire de Sid perdura dans obscurité, la hantant même dans sa mort. Pluton ne voulait être plus qu’une boule et se cacher dans un coin et ignorer toute cette histoire. Pourtant qu’importe où son esprit pouvait se mettre, il était impossible de se cacher. Non, dans cette infinité de noirceurs, le sourire du chien flottait toujours au-dessus de lui. Il ne pouvait rien faire, cette image allait rester ancrée au plus profond de lui. Dans un certain sens, Pluton avait réussi à tenir captif Sid, mais pas de la façon qu’il s’attendait. Il voulait partir d’ici, retrouver la planète Terre qu’il n’aurait sans doute dû ne pas quitter.
Ou était-il ? Était-il toujours vivant ? Il entendait d’étranges bruits, quelqu’un était visiblement en train de parler, mais impossible de cerner ce qu’il disait, mais cette fois semblait assez grave, c’était Kel ? Était-il venu à temps ? Sid était encore là il y a quelques secondes, en train de le torturer ! D’ailleurs le visage de Sid était parti. Le dieu de la mort tenta de saisir ce qui était dit, mais impossible de distinguer le moindre bruit, de puissants acouphènes prenant le dessus. Ces derniers étaient étranges, imprégnés d’un certain rythme qui faiblissait. Il pouvait commençait à entendre !
« … vrai, il s’est échappé ? … »
Non, ce n’est pas possible. Kel avait réussi, forcément… au même moment le visage de Sid se dessina au sol à la craie et Pluton se retrouvait au centre de son sourire. Les acouphènes du dieu de la mort continuaient à faiblir et le policier n’arriva pas pour autant à entendre d’autres mots. Ses pensées se mélangèrent et une étrange sensation de légèreté le parcourut. Seule cette douleur persistait dans la poitrine. Finalement, le dernier battement se fit entendre arrêtant ainsi sa triste berceuse. Le calme avait retrouvé sa place, sans Pluton qui venait de libérer son dernier soupir, si loin de la Terre.