Sujet: TROISIÈME PAGE - Joug
Sam 29 Juin 2024 - 5:24
Comptait-il les heures, les jours, les semaines ? Était-ce le seul droit qui lui était encore offert ? Comment pouvaient-ils agir ainsi ? Pourquoi seulement lui ? Pourquoi ce mal-être constant rongeait sa chair ? Qu’avait-il fait pour mériter ce traitement-là, le vilain petit canard qui possédait un don, un pouvoir semblable à aucun de ses pairs. Pourquoi le regardaient-ils avec ce regard d’oppression et de dégoût ? Simplement… Pourquoi ?
Le pauvre enfant pas plus haut que trois pommes, mais dont la conscience presque divine affectait sa psyché semblait être pris d’effroi chaque journée. Il faisait partie d’un tout, de quelque chose dépassant à l’instant sa morale ou sa compréhension, comme si sa raison d’être ne devait être tourné qu’envers une route, une ligne de conduite pré établi et immuable. Qu’il est difficile d’admettre que le libre arbitre accordé à la vie ne semblait pas disposé à lui sourire, une grâce interdite, une jouissance inconnue. Pourtant, il l’acceptait. Il acceptait sa condition, se pliant d’engagement à ce qu’on lui formulait comme parole d’évangile sacré, comme si au fond de son âme il comprenait tout l’engagement absolu de son entité. Ce qui hantait le cœur refroidit de cet enfant ne demeurait pas l’absence d’un désir fort de choix. Non. Ce sentiment bénin ne trouvait pas de résolution négative dans son for intérieur. Il aurait été celui qu’il était destiné à devenir pour ses “maîtres”, ses mêmes maîtres pour qui son attachement à eux restait inégalé, un amour sincère et naturel envers ses idoles dont il n’y avait en retour, qu’un néant vide, un rejet platonique et palpable.
Ainsi ses journées se déroulaient. Isolé et volontairement exclu, l’enfant travaillait dans son coin à la tâche dont il lui avait été donné la responsabilité. Son regard se perdant inlassablement sur les autres, ceux dont la lumière chaleureuse des sourires de ses maîtres les inondait. Chacun des enseignants prenaient avec le plus grand soin et la plus grande sympathie à guider tout à chacun, mais dès que leur pas assuré et clinquant se rapprochait de sa position, toute étincelle de son semblait disparaître dans les ténèbres, ne laissant qu’une absence même d’émotions, un vide éternel. Alors si par malheur ses émanations uniques, dont seul son être semblait engendrer, n'étaient pas enfouies ou maîtrisées, le son alors inexistant se brisait sous une avalanche macabre de palabres renvoyant la moindre parcelle de confiance de l’enfant au néant… Ils étaient ses maîtres, il avaient ce droit, leur devoir d’agir ainsi.. Et.. pourtant.. l’amour subsitait quant ses yeux se portaient sur eux, leur cheveux, d’un blanc immaculé ne pouvait pas empêcher d’éblouir ses prunelles d’envie et de contemplation. Chaque soir, chaque nuit, la noirceur lui rappelait les regards, et chaque soir, l’enfant dont le regard pétillait de vie quand il les observait, laissait échapper un fluide transparent le long de ses joues. La chaleur de ces larmes demeurait la seule source de réconfort face à la sécheresse l’envahissant, de son incompréhension à saisir les rudiments lui manquant pour leur plaire. Au dieu, c’est ce qu’il souhaitait.. au plus loin de son propre abîme de tristesse.. le juste retour de son affection.. de l’amour.