Le retour à sa demeure n’avait pas été facile pour le caporal honorifique. Son esprit était fixé sur ce qu’il venait de vivre : une expérience proche de la mort de la main d’une personne dont il aurait été capable de se sacrifier pour. Dans ses oreilles, la ville qui avait naquit de ses cendres pour vivre comme à l’époque n’était qu’un fond sonore au bruit blanc qui persistait et son esprit prit par la brume de l’incompréhension. Sa vue était fuyarde et floue. Il savait où il allait et faisait attention aux signalisations, mais il fut surpris plus d’une fois par des véhicules sur les passages piétons. Il fut arrêté plusieurs fois pour son bas recouvert de sang par les forces de l’ordre avant qu’il ne se justifie qu’avec l’usage d’un badge.
La seule chose qu’il voulait maintenant était une bonne douche et du repos. Beaucoup de repos. Autant qu’il pourrait se permettre à avoir avant de devoir retourner au quartier général de l’Armée pour voir davantage d’atrocités. C’était bizarre à dire, mais il pensait qu’à force de les voir, il se serait fait à l’idée de devoir subir l’un de ses supplices et ne pas être aussi impacté. Peu importe la théorie qu’il avait pu obtenir de la part de ses sauvages sanguinaires ou de leurs victimes, la pratique était bien pire que ce qu’il aurait toléré. Pourtant, il était toujours dans la danse. Il s’était fait à l’idée de rester aux côtés de Narumi malgré qu’il avait été aux portes de la mort pour une raison idiote.
Une fois rentré dans son appartement, il jeta directement le débardeur déchiqueté et le jogging ensanglanté dans sa poubelle et le reste sur son canapé. Ils allaient les nettoyer après s'être débarrassés de cette odeur infecte qui le poursuivait depuis son départ du dojo. L’odeur était bien pire que la vision de sa propre hémoglobine. Il était habitué à voir la couleur rouge à ce point, mais la pestilence de cette dernière ? Encore une première pour le militaire encore innocent jusqu’à ce jour. Il avait déjà saigné par l’époque, mais autant pour que l’odeur et le goût métallique restent dans ses narines et sa bouche jusqu’à un trajet complet entre Satan City et la Capitale de l’Ouest était… Indésirable était probablement le mot qui venait dans son esprit. Il se sentait ainsi.
Il lança enfin l’eau chaude et la priorité fut de se savonner pour faire disparaître ce parfum signé par la mort en personne. Cet infâme arôme qui devait uniquement à cause de Narumi. Il s’était mis d’accord sur le fait qu’il continuerait à la suivre malgré ce faux pas, mais… L’âme et l’esprit étaient deux choses bien distinctives. Son jugement logique lui disait de tout jeter et de retourner à sa vie de parieur, là où il serait au calme et loin de monstres comme Akaza. Son côté émotionnel lui disait qu’il aurait plus aucun repère sans l’armée et que son pouvoir serait inutile sans eux. Après tout, il avait critiqué durement Alicia Runhour pour manquer à utiliser ses capacités pour le bien commun. Quel genre de hypocrite serait-il s’il n’en faisait pas de même ? Surtout après… sa soudaine disparition ? Serait-ce trahir sa mémoire de tout abandonner pour la facilité ?
Une pensée dans sa tête était de revenir à tout rejeter sur l’émeraude comme à l’époque, mais elle n’était pas fautive pour cette expérience… Enfin, pourquoi l’artefact ne l’avait pas protégé avant de le téléporter proche du coup final ? Cela ne faisait aucun sens à moins… Qu’un message était essayé d’être passé. Était-ce sa façon de l’avertir face à l’Alpha ? En le mettant directement en proie à sa dangerosité et à son manque de contrôle ? Il soupira alors que l’eau continuait à se déverser du pommeau jusqu’à sa tête pour dégouliner tout le long de son corps. Une pensée des plus négatives lui vint à l’esprit. Il y avait une destinée après tout, non ? Hikaritatsu lui avait prouvé cela par sa simple existence et bien qu’elle soit modulable selon ses dires… Un scénario devrait suivre ses moments-clés. Et si confronter la louve était à un passage nécessaire dans son histoire ? En serait-il seulement capable de tenir face à la furie d’une femme qui était possiblement sa dernière attache à ce monde ?
Il coupa le torrent d’eau et se mit à se sécher. Le tout dans l’espoir de sortir ses mauvaises pensées de sa tête. Il avait toujours sa famille, non ? Il s’était distancé d’eux en prétextant que son travail à l'armée ne lui laissait aucun espace pour du temps libre. Il avait peur. Il avait des craintes que les toucher dévoilerait des choses qu’il préférerait ne pas connaître. Après tout, c’était son père qui l’avait introduit au poker indirectement et c’était un monde qui pouvait se montrer des plus cruels. C’était sans compter les cercles illégaux associés à l’activité, une chose que le joueur de carte avait tout fait pour rester éloigné. Encore des pensées qui tournèrent au négatif.
Il envoya ses vêtements dans la machine à laver avant de souffler de tout son être pour calmer et de se mettre au lit. Des minutes semblèrent être des heures. Son esprit ne faisait que revenir sur les derniers mots de Narumi et de la crainte de voir arriver ce jour. L’idée de se faire charcuter était certainement présente, mais c’était surtout concernant sa relation avec l’Alpha. Elle avait commis des atrocités, mais elle avait tout fait pour les réparer et redonner espoir et prospérité au peuple terrien. Elle avait failli mettre fin à sa existence, mais elle avait la raison pourquoi Williams avait la vie qu’il avait aujourd’hui. Il n’osait pas imaginer où il en serait sans le support de l’Armée derrière lui après la disparition de l'intemporelle. Il lâcha un soupir en se disant que malgré tout ça, il avait toujours de l’affection pour sa supérieure. Dans un coin de son esprit, il aurait aimé que ce soit assez pour briser cela, mais… Les émotions persistèrent toujours. Son devoir en tant que caporal était toujours présent. Une chose qu’il considérait comme une fierté malgré l’incertitude du mérite associé à son grade.
Il réussit enfin à fermer les yeux et à sombrer dans le sommeil profond après une bonne heure à cogiter sans résolution satisfaisante..
Demain est un autre jour après tout…
Qu’il soit meilleur que celui où la louve a montré ses véritables couleurs.
Pour que tu prépares à l’inévitable, Monsieur Auguste.