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La plus intrigante et terrifiante caractéristique de Zev est sa conscience de lui-même.

Il arrive qu’une personne se réveille et se rende compte que le monde est limité. Brisée par cette soudaine connaissance, cette personne finit par se sentir comparable à une divinité, la marionnette pouvant voir les fils. Zev a cette pensée, et pourtant il la sait fausse. Cette haine primale pour tous ceux qui l’entourent, comparable à l’observation de mouches, inoffensives et terriblement énervantes en dehors de leur rôle de suce-merde. Il la sait fausse, branlante, sans base. Il la cache, la camoufle et, il l’espère, agit suffisamment bien pour qu’elle ne paraisse que lorsqu’elle se manifesterait dans une personne normale. Mais il l’adore, cette haine qui dans ses monologues internes lui offre un si grand plaisir, une si grande satisfaction de son propre être, une occupation mentale pour son esprit qu’il n’arrive pas à faire égaler.

Il y a trois Zev dans le cinéma. L’acteur, le personnage et le spectateur qui les regarde tous les deux. Mais ce serait mentir que de les classifier comme ça. Il n’y a qu’un seul Zev dans le cinéma. Ce serait de la couardise de le cacher. Mais Zev est humain. Il l’a vérifié. Listons ses émotions.

L’amour. Zev n’aime personne. Il respecte certaines personnes. Mais il n’aime personne. Il voit leurs utilités et leurs capacités à résoudre ses problèmes. Il compare son attache à ces personnes utiles à l’attache des guerriers à leurs épées et des travailleurs à leurs outils. Peut-être aussi celle des enfants à leurs jouets. Il sait que c’est anormal, mais ça ne l’importe pas. Il n’aime personne. Non, c’est de mentir que de dire ça. Il aime sa fille. Il en est sûr. Il a vérifié. Il est content quand elle est heureuse. Il est mécontent quand elle est triste. Ses premiers réflexes quand elle est en danger sont de la protéger. C’est la garantie inconsciente de son amour. Définitivement.

La joie. Zev ne ressent pas de joie. Il peut rire. Il sait qu’il rigole principalement dans les situations où l’on n’aimerait pas qu’il rigole. Il s’est entraîné à se retenir. Mais le rire est un choc. C’est une réponse à l’absurde. Le monde qui entoure Zev est déconcertant et le fait rire. Ces personnages qui l’entourent sont burlesques. Mais ils sont la norme. C’est parce qu’il les voit comme des clowns qu’il n’est pas normal. Mais il ne ressent pas de joie. Pas de bonheur. Pas de béatitude. Pas d’épiphanie. Si, peut-être par petits chocs. Oui, des petits chocs de joie. La violence en est une source. La joie de Tempo en est une source. La victoire en est une source. Morale comme physique. Mais c’est une drogue. La joie est une drogue. Il faut la consommer par petite touche. S’il devient accro, il devient dangereux.

La tristesse. Zev n’arrive pas à être malheureux. Il peut être frustré. Il peut être vide. Il peut être mécontent. Jamais triste. Qu’est-ce qui pourrait le rendre triste ? Quand Tempo est triste, il ne l’est pas. Il est simplement frustré d’avoir laissé une situation attristante se développer. Mais sinon, du vide. Une attente de stimulation. Il parvient à pleurer sur commande.

La peur. Zev a très rarement peur. La nervosité de perdre le contrôle est ce qu’il pense en être. L’auto-préservation la plus primale aussi. Face à la mort, Zev a peur. Face à la mort de Tempo, Zev a peur. Il le pense. Sa réflexion s’accentue et s’accélère dans ses cas là. Il sent son coeur être appuyé. C’est une sensation déplaisante. Comment l’éviter ? En ayant le contrôle de la situation. Pas besoin de tout planifier à l’avance. L’improvisation, mais dans son sens. Il est intelligent. Il peut se débrouiller. Peut-être que c’est pour ça que c’est la démence qui le terrifie le plus. La décomposition indigne de son cerveau. Il se rapprochait de la possibilité que cela lui arrive. C’est une terreur existentielle. C’était absolument humain.

La colère. La colère est quotidienne. Tout est source de frustration. Le ridicule des limites des gens. Le ridicule des limites du monde. Le ridicule des limites de Zev. Les actes idiots des gens normaux. L’arrogance de ses pairs. La frustration de ne pas pouvoir faire ce qui lui plait. Vivre dans une violence limitée n’est pas son paradis. Il sait ce genre de désirs comme mauvais. Il est simplement frustré d’être né mauvais. Il est difficile pour Zev d’aimer des gens. Il lui est facile de les détester. Il devient vicieux. Il devient venimeux. Conserver le silence est une épreuve. Il est l’exception dans la gérance des sentiments. Les autres n’ont pas sa vision. Le rire candide et moqueur est le compromis qu’il se permet d’entreprendre pour éviter de les blesser vocalement comme physiquement. Il peut se les permettre.

L’ego. Zev n’a pas de complexe de supériorité. Il sait qu’il est supérieur. Il n’est pas plus intelligent que les autres quand bien même ils continuent à lui faire penser ça. Il n’est pas plus “fort” que les autres car la force n’a aucune définition plausible. Il est supérieur parce qu’il maîtrise cet égo. Il sait ce qu’il est. Il sait ce qu’il maintient. Ceux qui prétendent être comme lui ne savent pas se contenir. Il peut agir sans s’adapter aux autres. L’arrogance des uns est la confiance en soi des autres.

Le désir. Zev se souvient d’une époque où les hommes l’intéressaient tout autant que les femmes. Mais une fois la sensation de supériorité passée, il n’avait plus rien. Les femmes l’intéressent toujours. Mais même l’acte finit par ne plus l’intéresser. Il pourrait faire plus de sa journée. Il ne fait plus qu’apprécier la forme féminine de loin. Mais il y a toujours un problème. Il a tout autant de mal à les supporter que les hommes. Il a juste un plus gros catalogue d’insulte.

Le divertissement. Zev passe son temps libre à écouter de la musique qui ne plait pas aux jeunes. C’est du son dans ses oreilles. Le fait qu’il puisse se prendre à suivre les rythmes confirme son humanité. Il regarde des films en tout genre. Il se prend à acclamer les méchants. Il les comprend. Cela confirme son anormalité. Les gentils veulent conserver leur situation initiale. Ils se battent pleinement en voyant leur confort secouer. Ils sont égoïstes. Les méchants ont les connaissances et la confiance nécessaire pour faire changer les autres. Pour s’imposer dans un milieu hostile. Il comprend. Les films le stabilisent. Il aime en parler. Il aime s’entendre en parler.

L’intelligence. Zev possède beaucoup de connaissances qui comprennent beaucoup de sujets différents. Il réfléchit froidement, ce qui lui permet d’utiliser sa logique quand les autres n’y parviennent pas. Il a bonne mémoire. Il s’en est assuré. Il la cultive. Il a du mal à s’adapter aux nouvelles technologies. Ce n’est pas une preuve de stupidité. Elles n’ont simplement pas été construites en le prenant en considération. C’est leur droit. Elles n’ont pas à s’adapter à lui. C’est à lui de s’adapter à elles.

La philosophie. Zev n’est pas investi dans quelconque politique. Il le fut, un jour. Mais cela n’a plus d’importance. Il l’a vérifié. Le bien et le mal n'existent que parce que l’humain les a inventés. Ils servent à juger quelle action est acceptable et quelle action ne l’est pas. Ils servent à juger quelle vie mérite de continuer et quelle vie doit cesser. L’objectif est de vivre et de se satisfaire. Continuer à vivre. Continuer à faire vivre ceux qui importent. Quand viendra l’heure, mourir satisfait. C’est tout ce qu’il y a. Il l’a vérifié.

La santé mentale. Ha !

L’honnêteté. Zev n’est pas très honnête. Il ment régulièrement. Généralement, simplement pour s’amuser. Parfois, il le fait afin de parvenir à ses fins. Il parvient à rendre ses mensonges convaincants. La confiance qui lui permet de s’imposer et manipuler les conversations lui permet de raconter ses bobards comme s’ils étaient réels. Cela fait travailler sa créativité et son imagination. Ne considérez donc pas son histoire comme des faits.